Cet article fait suite à l’édito paru dans notre bulletin de juillet – aout 2014

Les principales caractéristiques des futures gares du Grand Paris Express commencent à être connues. Les dispositions retenues pour les gares de correspondance seront particulièrement impactantes pour les usagers. Qu’en sera-t-il pour Saint-Denis – Pleyel vers laquelle convergeront les lignes 14, 15, 16 et 17 du GPE, en correspondance avec le RER D, la ligne H du Transilien et la ligne 13 du métro ?
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Qu’en est-il du pôle Saint-Denis – Pleyel aujourd’hui ?
Aujourd’hui, il existe pratiquement deux demi-pôles sans liaison l’un avec l’autre et qui se tournent le dos.
A l’ouest du faisceau ferroviaire issu de Paris-Nord, la station de métro Carrefour Pleyel de la ligne 13 et ses trois lignes de bus.
A l’est du faisceau ferroviaire, la gare Stade de France – Saint-Denis du RER D desservie aussi par trois lignes de bus.

Le futur pôle multimodal de Saint-Denis – Pleyel

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Choisi par la Société du Grand Paris comme nœud majeur du réseau du Grand Paris Express, le site de Saint-Denis – Pleyel est donc appelé à devenir l’un des principaux nœuds d’intermodalité d’Ile-de-France.
Les deux demi-pôles actuel seront réunis et constitueront un ensemble particulièrement complexe.
En effet, y convergeront, en sus du RER D, de la ligne 13 et des lignes de bus :

 la ligne 14 en provenance de l’aéroport d’Orly et qui constituera une transversale majeure à travers Paris,

 la ligne 15 en provenance de la Défense qui drainera le trafic en provenance des Hauts-de-Seine,

 la même ligne 15 en provenance de Champigny-sur-Marne et qui assurera un rôle de rocade de Petite Couronne à travers les départements du Val-de-Marne et de Seine-Saint-Denis,

 la ligne 16 qui elle constituera une rocade est de Grande Couronne de Noisy – Champs à Saint-Denis,

 la ligne 17, en provenance de l’Aéroport Charles-de-Gaulle,

 la ligne H du Transilien puisqu’il est envisagé d’aménager en gare de Stade-de-France – Saint-Denis des quais supplémentaires qui permettront aux trains en provenance de Pontoise, Persan-Beaumont et Luzarche de desservir cette gare.

Intermodalité
La qualité de l’intermodalité dépendra étroitement de la qualité des correspondances qui auront été aménagées. La disposition des quais et les liaisons entre eux seront déterminantes pour l’efficacité de ce pôle.

Emplacement de la gare du GPE
Lors du débat public relatif à la future ligne 16, deux emplacements ont été présentés par les documents officiels comme possibles pour la future gare du GPE. Le premier, situé à l’est du faisceau ferroviaire privilégiait les correspondances entre les quatre lignes du GPE, la gare du RER D et les futurs quais de la ligne H. Le second, situé à l’ouest du faisceau ferroviaire favorisait plutôt les projets locaux d’urbanisme portés par la Communauté d’Agglomération de Plaine-Commune et la mairie de Saint-Denis au détriment de la qualité des correspondances.
Comme pour d’autres sites, la SGP semble avoir choisi de privilégier les intérêts locaux au détriment de ceux des usagers franciliens qui seront en correspondance à Saint-Denis – Pleyel. Ces usagers, bien plus nombreux que ceux issus du trafic local, ont le tort de n’être pas électeurs à Saint-Denis. C’est donc le site situé à l’ouest du faisceau ferroviaire qui a été choisi. Ce choix ne sera pas sans conséquence pour les usagers franciliens.

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A propos des correspondances entre le GPE et les lignes D et H
Le choix du site ouest rend particulièrement malaisée la correspondance entre les lignes D et H d’une part et le GPE d’autre part, puisque la distance à parcourir par les usagers entre les quais de ces deux groupes de ligne attendra presque les 400 m !
Pire, tenant peu compte de la différence de niveau de près de 30 m entre les quais du RER D et de la ligne H et ceux du GPE, les concepteurs prévoient de franchir cette distance au moyen d’une passerelle et non par un passage souterrain. Cette disposition accroit encore les difficultés pour les usagers car elle leur impose de se hisser au-dessus des voies SNCF, à près de 10 m de hauteur, parcourir la passerelle et ensuite redescendre vers les quais du GPE par une dénivellation de l’ordre de 40 m.
Que faire pour réduire autant que possible la pénibilité du trajet entre les lignes D et H d’une part et le GPE ? Certaines préconisations nous semblent relever du bon sens :

  mécaniser les accès des quais des lignes D et H vers la passerelle, avec ascenseurs pour les PMR;

  couvrir les escaliers mécaniques et surtout la passerelle sur toute sa longueur pour protéger les usagers des intempéries ; cela aussi va sans dire, mais il existe en Ile-de-France tant de gares, comme la récente Créteil-Pompadour, sans protection efficace qu’il est nécessaire de le rappeler ;

  mécaniser la passerelle, comme cela a été fait en 2012 à Massy-Palaiseau (mais dans un seul sens faute de budget !)

  enfin engager une réflexion sans a priori sur les moyens à mettre en œuvre pour résoudre au mieux le problème inédit posé par une dénivellation de près de 40 m, équivalente à la hauteur d’un immeuble de 12 étages (!) entre la passerelle de correspondance et les quais souterrains du GPE.
Une différence de niveau aussi considérable se présente pour la première fois sur le réseau des transports publics franciliens. Aucune autre station, aussi complexe soit-elle, ne comprend de telles dénivellations. A ce jour, le projet comporte des batteries d’escaliers mécaniques se succédant de niveaux en niveaux, depuis les quais jusqu’à la passerelle. Ainsi, les usagers en correspondance entre le GPE et les lignes D et H emprunteront successivement six (!) escaliers mécaniques pour atteindre la passerelle de correspondance ! Cette disposition qui est une extrapolation des solutions appliquées habituellement aux lignes ferroviaires franciliennes ne nous parait pas adaptée au problème posé à Saint-Denis-Pleyel. En effet, elle risque de générer les inconvénients suivants :

  une complexité évidente du cheminement pour les usagers et une certaine illisibilité du parcours pour les usagers occasionnels,

  une durée excessive du cheminement vers la passerelle,

  un risque d’indisponibilité partielle ou totale des escaliers mécaniques que celle-ci soit due à une panne, à une opération d’entretien ou de renouvellement ou à toute autre cause ; en effet, devoir utiliser 6 appareils successifs multiplie le risque d’indisponibilité de l’un d’entre eux par … 6.
C’est pourquoi il nous parait raisonnable de demander que la solution « ascenseurs » soit sérieusement étudiée. Une batterie d’ascenseurs automatiques de grande capacité assurant une relation directe du niveau « passerelle » vers le niveau « salle d’échange » du GPE permettrait non seulement de franchir cette dénivellation plus agréablement et plus rapidement, mais surtout de pallier l’indisponibilité de l’un d’entre eux sans que la qualité du service en soit significativement affectée.
Par ailleurs, ces appareils, accessibles aux PMR contrairement aux escaliers mécaniques, dispenseront le maitre d’ouvrage de construire des ascenseurs supplémentaires spécifiquement destinés aux PMR.
Enfin, les technologies actuelles de réduction de consommation électrique applicables aux ascenseurs inscriront ceux-ci dans une démarche environnementale en contribuant à diminuer l’empreinte carbone du pôle multimodal et en réduisant ses dépenses de fonctionnement.
Cette solution a déjà été mise en œuvre dès les années 70 dans certaines stations parisiennes du RER, comme Auber, alors que les dénivellations à franchir sont plus faibles que celle qui existera à Saint-Denis – Pleyel. Cette solution a été plébiscitée par les usagers, et pas uniquement par les PMR.

A propos des correspondances entre les différentes lignes du GPE

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Lors de la construction du tronçon central du RER A et de la jonction Luxembourg – Gare du Nord du futur RER B, les concepteurs de la gare souterraine de Chatelet-Les Halles ont tenu à réaliser des correspondances quai à quai pour les flux principaux de voyageurs de ces deux lignes majeures de transport public. C’est ainsi que les voyageurs provenant des branches est du RER A peuvent bénéficier d’une correspondance aisée vers les branches nord du RER B. De même pour les voyageurs provenant du RER B sud et souhaitant emprunter les branches ouest du RER A. Il en est de même dans les sens inverses.
A la station Gare de Lyon, la superposition des lignes A et D permet aussi des échanges simples et rapides. Les voyageurs ont plébiscité cette disposition des lieux et c’est à la Gare de Lyon que se font majoritairement les échanges entre ces deux lignes, et non à Chatelet où la disposition des lieux oblige les usagers à emprunter la salle d’échanges.
De même, ceux-ci privilégient les échanges entre les lignes B et D à Gare du Nord où ils peuvent s’effectuer quai à quai plutôt qu’à Chatelet où le passage par la salle d’échanges est peu apprécié.
Tenant compte de cette expérience, il est particulièrement regrettable qu’aucun effort n’ait été fait dans la conception de la gare de Saint-Denis – Pleyel du GPE pour ménager des correspondances quai à quai entre les différentes lignes du GPE, en privilégiant les flux futurs les plus importants. La juxtaposition des lignes telles qu’elles arrivent et sans le souci des usagers est une erreur de conception majeure. Elle obligera la grande majorité des usagers à transiter par la salle d’échanges entrainant stress et fatigue inutiles.
Ainsi la fameuse liaison performante entre la Défense et l’aéroport CDG (lignes 15 et 17) nécessitera-t-elle non seulement dix arrêts intermédiaires entre ces deux pôles et une rupture de charge à Saint-Denis- Pleyel, mais aussi un passage obligé par la salle d’échanges. Les voitures particulières et les taxis pour Charles-de-Gaulle ont encore de beaux jours devant eux !
A ce jour, les seules liaisons quai à quai possibles à Saint-Denis – Pleyel seront réservées aux voyageurs :

  arrivant de la ligne 15 est (rocade est de Petite Couronne) et se dirigeant vers les lignes 16 (rocade est de Grande Couronne) et 17 (aéroport CDG),

  arrivant de la ligne 15 ouest (La Défense) et empruntant la ligne 14 vers Paris.
En tout, un trafic minime par rapport aux flux les plus importants qui devraient être ceux entre les lignes 15 est, 16 et 17 vers la ligne 14 d’une part et 16 et 17 vers la 15 ouest d’autre part.
Apparemment, l’influence « métro parisien » où les correspondances quai à quai sont rarissimes au détriment de l’influence « RER » où elles sont plus fréquentes l’a emporté au détriment des usagers.

A propos de la liaison avec la ligne 13 du métro
Nous avons expliqué pourquoi le choix de l’emplacement de la gare du GPE à l’ouest du faisceau ferroviaire pour favoriser les projets locaux d’urbanisme était préjudiciable aux usagers franciliens appelés à utiliser la correspondance entre les lignes D et H d’une part et les lignes du GPE d’autre part.
Au moins, pouvait-on imaginer que cette disposition pouvait permettre une liaison convenable avec la station Carrefour Pleyel de la ligne 13 du métro. Il n’en est rien ! Et rien n’est prévu à ce jour pour y remédier. C’est donc par la voirie que les usagers en provenance de la partie nord de cette ligne devront rejoindre les lignes 15, 16 et 17 du GPE, seule la ligne 14 du GPE étant reliée à la ligne 13 par une correspondance à la Mairie de Saint-Ouen.

En résumé, la Société du Grand Paris a encore beaucoup à faire pour que la gare de Saint-Denis – Pleyel assure dans les meilleures conditions son rôle de pôle multimodal majeur au service des usagers franciliens.